Lettre à l'immortelle bien-aimée Op. 88 for Clarinet Quartet with Optional Narrator by Richard Dubugnon

Commissioned by the Anches Hantées clarinet quartet

Duration: 13 minutes

Programme Notes

La Lettre à l'immortelle bien-aimée est un quatuor de clarinettes qui s'inspire librement de la lettre manuscrite de Ludwig van Beethoven à une inconnue, jamais envoyée et retrouvée dans ses papiers après sa mort en même temps que le célèbre Testament d'Heiligenstadt. Il s'agit d'une lettre d'amour fiévreux de dix pages écrite vers 1812, mais toutes les recherches pour établir l'identité de sa destinataire furent vaines. Ce "brouillon" de lettre au crayon avec certains mots biffés comme "Oh geh mit !" (Oh, pars avec moi!) laisse imaginer le tourment que vivait Beethoven dans ce qui apparaît comme une relation impossible. La ponctuation et de nombreux tirets typiques de l'auteur évoquent les pauses de l'esprit agité de Beethoven et peuvent être rapprochés aux "soupirs" qu'il emploie souvent aussi en musique et qui sont du plus bel effet expressif.
 
La musique de la Lettre à l'immortelle bien-aimée de Richard Dubugnon est en trois parties (ou "lettres", comme dans le manuscrit de Beethoven) qui se jouent d'un seul tenant, un mouvement expressif lent parcouru de moments plus rapides et frénétiques qui tentent de suivre les épanchements du coeur de Beethoven retrouvés dans la lettre. Outre la présence des fameux soupirs expressifs, il y a des rappels de certaines des compositions de Beethoven. Sans pour autant faire de référence stylistique directe à sa musique, ce sont de lointains souvenirs sous forme de petits intervalles ou des rythmes hérités des oeuvres écrites à cette époque, à savoir la 7ème symphonie et la 10ème sonate pour violon. On entend à un moment la citation du fameux motif "Es muss sein!" griffonné par Beethoven sur la page du final de son 16e et dernier quatuor à cordes.
 
Cette oeuvre est la troisième et de loin la plus intime des trois compositions de Richard Dubugnon s'inscrivant dans un triptyque d'hommages musicaux à Beethoven : la première pièce Caprice IV "Es muss sein!" (2017) pour orchestre de formation Mannheim, exploitait la cellule musicale griffonnée par Beethoven sur son 16ème Quatuor à cordes sous les mots "Muss es sein ? Es muss sein!", le Tombeau de Napoléon pour trombone et orchestre (2018) évoquait la relation complexe et paradoxale de Beethoven avec la figure de Napoléon Bonaparte.
 
C'est la deuxième commande à Richard Dubugnon émanant du quatuor de clarinettes Anches Hantées, la première oeuvre Saratoga Trails (2011) avait fait l'objet d'un enregistrement discographique (SUITE & FUNK, Anima, 2011) suivi de très nombreux concerts, en récitals ou dans le cadre des spectacles pédagogiques Ma mère l'Oye avec également la musique de Maurice Ravel. Cette oeuvre fait partie à présent du répertoire de quatuor de clarinettes, étant reprise par de nombreux ensembles de par le monde.